Définition
Les questionnements plasticiens regroupent l’ensemble des questions, réflexions et enjeux artistiques que les artistes, plasticiens, pensent, mettent en tension, remettent en question, utilisent, abandonnent, réutilisent.
Les questionnements plasticiens sont le « que créer ? », « comment le créer ? », « pourquoi le créer ? », « pour quoi ? », « pour qui ? », « pour quand ? », « pour où ? », « avec qui le créer ? »
Ces questions ne sont pas toutes nécessairement anticipées par l’artiste. Lors du processus de création, il peut y avoir hasard, imprévu, accident, échec obligeant à des changements, tâtonnements, abandons et reprises.
Pablo Picasso : « Si l’on sait exactement ce qu’on va faire, à quoi bon le faire ? ”
Les questionnements plasticiens invitent l’artiste et le spectateur à interroger la formalisation d’une œuvre (intention, démarche, processus de création), ou comment penser et faire oeuvre.
Langages, moyens, pratiques et techniques plastiques sont au service d’une intention artistique. Outils, médium, support, gestes et postures, matériaux, composition, organisation soutiennent, révèlent, mettre en tension ou s’opposent au désir de création de l’artiste. Si celui-ci arrive à son but, à son objectif, à finaliser son oeuvre, il peut alors penser sa présentation ou confier cette mission à un scénographe, commissaire d’exposition ou curateur.
La réception du fait artistique, de toute oeuvre par un public dans un espace donné fait entrer en dialogue, harmonieux ou conflictuel, oeuvre, artiste, spectateur et espace.
Ces questionnements guident la réflexion lorsqu’elle est mise en pratique, lors d’une pratique à visée artistique et aussi lorsque la réception devient analytique, mettant en exergue les enjeux artistiques d’une oeuvre à travers l’histoire, l’histoire de l’art et l’Histoire humaine.
Les questionnements centrés sur l’histoire des oeuvres et des mouvements artistiques, la biographie des artistes, l’esthétisme ou les propos conceptuels des oeuvres ne sont pas des questionnements plasticiens mais des questionnements d’historiens de l’art, de philosophes ou de critiques d’art.
https://www.goconqr.com/en-US/mindmap/39666681/questionnements-plasticiens
Problématiser
Pour quoi, d’où vient ce besoin et pourquoi créer ? Avec quelle intention et pour quel(s) objectif(s) ? Pour qui ? Comment ?
Que créer ? Comment le formaliser ? Comment le donner à voir ? Comment sera-t-il reçu ? Qu’en faire une fois créé ?
Dans quelle mesure un questionnement plastique est-il transhistorique ? transculturel ? interdisciplinaire ? transversal ?
En quoi le questionnement plasticien est-il le reflet d’un questionnement personnel, introspectif, autobiographique ou au contraire sociétal, engagé au nom du plus grand nombre ?
En quoi les questionnements d’un artiste plasticien font-ils écho aux questionnements d’un autre individu (spectateur ou autre créateur) ? d’une société (un large public) ? d’une culture ?
Références artistiques + flashcard pour les mémoriser (traces résumées dans le carnet de recherche attendues)
Michel-Ange, dessinateur, peintre, sculpteur et architecte de la Renaissance italienne.
Poly-artiste capable de maîtriser plusieurs domaines artistiques, avec la même intention, ambition, soif de perfection.
« Seigneur, accordez-moi la grâce de toujours désirer plus que je ne peux accomplir. […] J’ai vu un ange dans le marbre et j’ai seulement ciselé jusqu’à l’en libérer”.
« Un génie universel, capable d’embrasser à la fois et de pousser à toutes leur perfection les arts de la peinture, de la sculpture et de l’architecture » selon Giorgio Vasari, auteur du recueil biographique Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, 1568.
Marcel Duchamp pense que les artistes sont poussés par une force ; Ils ne créent pas toujours en pleine conscience mais sont aussi les observateurs de leur geste créateur. L’humour pour lui est un constituant plastique essentiel :
Beaucoup de ses oeuvres préfigurent des mouvements artistiques contemporains (voir document ci-après).
« [Je] crois que l’artiste qui fait cette oeuvre, ne sait pas ce qu’il fait. Je veux dire par là : il sait ce qu’il fait physiquement, et même sa matière grise pense normalement, mais il n’est pas capable d’estimer le résultat esthétique. […] Il y a une chose profonde que l’artiste a produite sans le savoir. Et j’insiste là‑dessus parce que les artistes n’aiment pas qu’on leur dise ça. L’artiste aime bien croire qu’il est complètement conscient de ce qu’il fait, de pourquoi il le fait, de comment il le fait, et de la valeur intrinsèque de son œuvre. A ça, je ne crois pas du tout. Je crois sincèrement que le tableau est autant fait par le regardeur que par l’artiste. […] L’œuvre d’art n’a pas de valeur, aucune, d’ordre numérique ou d’ordre même moral. C’est une chose qui s’impose par sa présence, uniquement. Cette présence est telle qu’elle passe de siècle en siècle et est conservée comme une chose unique et qui donc n’a pas de prix » .
Entretiens avec Marcel Duchamp, rapportés par Georges Charbonnier, 1960, Éditions André Dimanche, 1994.
Fabienne Verdier est une artiste plasticienne, peintre et calligraphe contemporaine qui invente ses outils (pinceaux immenses réalisés avec plus de 35 queues de chevaux) afin de mettre en oeuvre son processus créatif, hybride entre l’art oriental (elle se forme en Chine de 1983 à 1992) et occidental (hommage aux primitifs flamands comme Van Eyck, Memling ou Van der Weyden et à Paul Cézanne).
Ai Weiwei est une figure incontournable de la scène artistique indépendante chinoise. Il incarne l’opposition au pouvoir et l’emblème de la liberté d’expression. Ai Weiwei est à la fois écrivain, photographe, architecte, sculpteur, commissaire d’exposition, blogueur et militant. Jusqu’à ses 17 ans, il vit dans un camp de travail et de rééducation, car son père, poète et intellectuel, a émis des critiques vis-à-vis du régime, en pleine révolution culturelle.
https://www.goconqr.com/en-US/flashcard/39753875/questionnements-plasticiens-references
Vocabulaire lié
- La démarche artistique, démarche de l’artiste
- L’artiste plasticien
- L’inspiration
- La créativité
- Les modalités d’expression
- Les enjeux artistiques
- Le statut de l’artiste
- Le statut de l’oeuvre, de l’objet artistique et du geste artistique
- Projet ou formalisation d’une oeuvre (intention > expérimentations et investigations > démarche > processus de création)
- Modalités du processus de création : choix des outils, médium, support, gestes et postures, matériaux, composition, organisation. Travailler avec le hasard relève aussi d’un choix.
- Les questionnements sur la forme
- Les questionnements sur la représentation
- Les questionnements sur la présentation
- Les questionnements sur les matériaux, la matérialité et l’immatérialité d’une oeuvre
- Les questionnements sur l’espace de l’oeuvre
- Les questionnements sur la réception de l’oeuvre
- Les questionnements sur la pérennité ou éphémérité, temporalité, conservation de l’oeuvre
- L’intention répond à une commande (État, religion, institution, mécène, …) ou est totalement libre ?
- Hasard, accident, imprévu
Liens avec les oeuvres et thèmes du baccalauréat session 2025 (traces résumées dans le carnet de recherche attendues) : RAPPORTS AU REEL
Les questionnements plasticiens sont à interroger quelles que soient les oeuvres, les artistes ou les thèmes travaillés.
Les deux thèmes de cette session sont : Documenter et augmenter le réel et Nature à l’oeuvre.
Documenter et augmenter le réel
- Réel / réalité : Si le réel est bien ce qui est et, en tant que tel, un et absolu, la réalité en est la représentation, et même la reconstruction de plus en plus « approchée ». On parle ainsi de réalités physiques, chimiques, économiques, sociales, culturelles, sensibles, intelligibles, individuelles, collectives. La réalité n’est donc pas une et absolue comme l’est le réel, elle est multiple et change avec les époques et les différentes civilisations, selon l’état des moyens d’investigation scientifiques et d’opération techniques. La réalité est donc bien une re-présentation, sensible ou/et intelligible, individuelle ou/et collective, du réel, qui, lui, ne change pas en lui-même.
L’artiste avec ses intentions, démarches, processus, moyens, modalités, et questionnements plastiques propose donc à travers son oeuvre sa vision du réel, sa réalité, sa représentation fidèle ou pas, du réel. L’écart entre le réel et la représentation qu’en propose l’artiste est donc un champ à explorer. (cf Valeurs expressives de l’écart : autre partie du programme).
L’artiste peut représenter le réel
Exemples de représentations du réel, de la plus fidèle à la moins fidèle :
La Mimèsis (du grec imitation) et mythe de Zeuxis : Extrait de l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien : « [Zeuxis] eut pour contemporains et pour émules Timanthès, Androcyde, Eupompe, Parrhasius. Ce dernier, dit-on, offrit le combat à Zeuxis. Celui-ci apporta des raisins peints avec tant de vérité, que des oiseaux vinrent les becqueter; l’autre apporta un rideau si naturellement représenté, que Zeuxis, tout fier de la sentence des oiseaux, demande qu’on tirât enfin le rideau pour faire voir le tableau. Alors, reconnaissant son illusion, il s’avoua vaincu avec une franchise modeste, attendu que lui n’avait trompé que des oiseaux, mais que Parrhasius avait trompé un artiste, qui était Zeuxis. »
L’artiste peut présenter, agencer ou détourner le réel pré-existant
Chaque élève, individuellement, réalise un exposé en 5 minutes (fichier audio à déposer sur Netboard dans l’onglet « Entrainements audios/videos ») sur une des oeuvres d’un de ces artistes.
Votre exposé présentera de manière synthétique, l’artiste et l’oeuvre et expliquera dans quelle mesure la prise en compte du réel est identifiable à travers la démarche et les questionnements plasticiens de l’artiste.
Vous réaliserez également une mnémographie de son nom avec au moins 3 de ces oeuvres.
https://view.genially.com/617841d0af937b0dd4a3c82d/presentation-mnemographie
- Petite Danseuse de 14 ans d’Edgar Degas, 1881 : coiffée de vrais cheveux, vêtue d’un tutu et de véritables chaussons
- Nature Morte à la Chaise cannée, 1912 (corde pour le cadre et morceau de toile cirée collée) ou Tête de Taureau de Pablo Picasso, 1942 (selle et guidon de vélo)
- Les ready-made (au choix) de Marcel Duchamp dès 1913.
- Raoul Hausmann avec sa Tête mécanique – l’esprit de notre temps, 1919 : assemblage d’objets pré-existants
- Arman, Martial Raysse, Daniel Spoerri et Jean Tinguely : artistes du Nouveau Réalisme
- Joseph Beuys, Christian Boltanski et Robert Filliou : portée symbolique des objets réels
- Bertrand Lavier, Tony Cragg et Jeff Koons : le réel de la société de consommation
- Artistes du Land Art : le réel naturel agencé (Nils Udo, Andy Goldsworthy, Robert Smithson, Walter De Maria)
- Damien Hirst et série Natural History et les chevaux de Maurizio Cattelan : animaux réels conservés et exposés
- Joseph Kosuth : le réel concret, présenté et photographié, existant dans le langage
- Loup-Table de Victor Brauner
- Les performances et peaux d’Heidi Bucher
Exemple donné en classe
Ágnes Dénes pionnière de l’art écologique (Augmenter le réel par une action artistique + Nature à l’oeuvre)
Qui est Agnes Denes ? Comment définir un art écologique ? Qu’est-ce qu’un art engagé ? Qu’est-ce que l’artivisme ? Filiation avec la plantation de 7000 chênes de Joseph Beuys.
L’artiste peut documenter le réel et se documenter avec le réel
Le statut du document, du latin documentum, « ce qui sert à instruire » est ainsi à questionner. En effet, le document servant de preuve, de trace ou de témoignage est parfois agencé de façon artistique aux côtés de l’œuvre aboutie. Ainsi, la production documentaire tend à devenir production artistique.
Problématique : Dans quelle mesure les artistes (dessinateurs, peintres), avant la naissance ou au début de la photographie, étaient-ils les témoins de leur temps, de leurs moeurs, de leur époque ?
Exemple avec les tableaux de Joseph Vernet, véritable témoignage des activités de chaque port au XVIII ème siècle. Dans chaque marine, à chaque plan, il y a un genre : scène de genre au premier plan, paysage dans les lointains et peinture d’histoire en vue globale.
- Léon Lagrange, critique et historien de l’art, dans la préface de son ouvrage de 1864 : Les Vernet. Joseph Vernet et la peinture au XVIIIe siècle, à propos de l’oeuvre de Vernet, La Ville et la Rade de Toulon, écrira :
« OEuvre remarquable par l’exactitude des lieux (= document) que par le sentiment du pittoresque ( = création artistique), par l’intelligence de l’ensemble que par la multiplicité des détails… où le génie du peintre a su réunir la précision d’un document officiel à la dignité d’une oeuvre d’art ».
- Alexandre Cantin, Les Ports de France (1753-1763) de Joseph Vernet : un regard au service du roi. In: Histoire de l’art, N°65, Paysages urbains. pp. 59-69. Dans le résumé de cet article, il écrit ceci :
« Par la mission dont il s’est vu chargé, Joseph Vernet devait fournir au roi une représentation des ports français non seulement fidèle, mais également agréables au regard. De prime abord, les Ports de France semblent dépeindre précisément les lieux visités par le peintre, mais à y regarder de plus près, il apparaît que, pour des raisons de propagande royale et pour des raisons esthétiques, Vernet a cru bon de prendre quelques libertés avec la réalité. La nature même de cette commande différencie les Ports de France de la veduta conçue par Canaletto. Contrairement à ce dernier, Vernet a cherché à représenter les ports vus dans
leur ensemble. On peut en revanche rapprocher l’oeuvre de Vernet de celle du peintre hollandais Van Wittel et plus particulièrement de ses vues de Naples, commande publique également, qui semble devoir répondre à des impératifs semblables. Pourtant seul Vernet semble devoir concilier l’exécution d’un beau sujet et une représentation exhaustive ».
- En 1753, le journal des décisions du roi Louis XV indique que Joseph Vernet
« sera chargé de peindre tous les ports de France« . Vernet s’engage alors dans un reportage pictural de la Méditerranée à l’Atlantique qui durera plus de dix ans. De cette commande royale, dont l’objectif consiste à faire connaître la puissance maritime de la France, naissent quinze tableaux majeurs à travers lesquels la peinture de marine acquiert une nouvelle reconnaissance. Précieux témoignage de la société du XVIII ème siècle, la série des Vues des Ports de France est exposée au musée national de la Marine grâce à un dépôt du musée du Louvre. Ces chefs d’oeuvre peints par Vernet, montrent l’activité maritime des ports ainsi que les modes de vie des populations. De Marseille à Dieppe, on suit le peintre pas à pas dans son périple, témoin de ses interrogations face à la toile, de ses compromis mais aussi de ses choix d’artiste qui assureront la qualité de l’oeuvre et sa postérité.
- Le rapport au réel et à l’aspect documentaire sont primordiaux, c’est d’ailleurs le mot d’ordre du Marquis de Marigny, dont témoignent les traces de leur correspondance en 1756 :
« Avec votre talent on peut réunir le mérite de l’imitation et celui de l’invention ».
- C’est une fois sur place que Joseph Vernet croque les gens qui s’activent sur le port et autour. Il réalise de très nombreuses études.
Ces dessins d’observation montrent les corps de métier. Il s’en fait des répertoires dans lesquels il ira puiser. Il travaille très vite, à l’oeil acéré, dessinant avec précision, les gestes, la posture du corps, les plis des vêtements, qu’il rehausse d’un lavis gris sur ces dessins à la
plume. « J’ai commencé à finir le tableau de la rade de Toulon le 15 décembre 1755
auquel j’ai travaillé pour le dessin et l’ébauche environ 15 ou 20 jours ».
Dessins d’observation = relevé documentaire du réel (croquis de Joseph Vernet, à la plume et encres sur papier)
Documenter le réel questionne à la fois ce qui est donné à voir, le réel (le monde concret qui nous entoure, unique, identique pour tous) à distinguer de la réalité (notre perception du réel, individuelle, propre à chacun, donc multiple), et la manière de donner à voir : sur quel support, sous quelle forme, quel format ? L’information qui est donnée est-elle véridique ou pas ?
Le réel peut être capté par des appareils comme en photographie mais il est toujours le fruit d’une intention, d’un cadrage, d’un point de vue, d’un instant. L’objectivité est donc toute relative voire impossible. Le réel n’est pas limité au matériel. La lumière, les sons, le vent… sont immatériels, non préhensibles, pourtant ils sont bien réels.
Ainsi le réel a été pendant des siècles le référent de certains artistes. Mais la transcription qu’ils en proposent relève toujours d’une réalité, de leur réalité, de leur perception du réel, c’est une portion du réel vu à travers un tempérament.
Nécessairement, il y a écart entre le réel qui nous entoure et ce que l’artiste en retranscrit. Nécessairement, il y a un écart entre la réalité de l’artiste, ce que nous, spectateur, en comprenons, et notre réalité propre. Les valeurs expressives de l’écart et les rapports au réel sont des entrées fondamentales pour analyser une œuvre.
Rosa Bonheur et la photographie (// Arts et technologies)
Source : https://rosabonheur77.fr/fr/fiche-evenement/rosa-bonheur-une-artiste-photographe-de-lintime
Passionnée de sciences et curieuse des nouvelles inventions, Rosa est captivée par la photographie. L’artiste achète et collectionne des tirages pour compléter sa documentation et préciser son travail. En outre, elle est parmi les premières femmes photographes de notre histoire. Rosa Bonheur réalise un grand nombre de clichés qu’elle développe ensuite dans son cabinet de photographie, une minuscule pièce située au fond de son atelier, demeurée intacte.
Quelques extraits du catalogue :
Rosa Bonheur par sa peinture nous documente aussi : (// Arts et sciences)
Dans la thèse de doctorat vétérinaire qu’elle a consacrée à Rosa Bonheur en 2013, Léa Rebsamen souligne l’exactitude anatomique des sujets de l’artiste, dont elle salue « l’éthique de travail acharné » jusqu’à faire d’elle « la plus scientifique, la plus naturaliste de tous les peintres animaliers ». Rosa Bonheur elle-même, revenant en 1897 sur les débuts de sa carrière, insiste sur l’observation approfondie qu’elle a toujours consacrée à ses sujets : « avant d’entreprendre l’étude d’un chien, d’un cheval, d’une brebis, je me familiarisai avec l’anatomie (étude des organes et formes des corps des êtes vivants), l’ostéologie (étude des os), la myologie (étude des muscles) de chacun d’eux. Je faisais même des travaux de dissection, et c’est encore un conseil que je donne aux animaliers ». Léa Rebsamen (sous la direction de Christophe Degueurce), Rosa Bonheur, artiste animalière au 19ème siècle, Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort, 2013, p.12.
La race bovine Morvandelle reste encore aujourd’hui une énigme pour bon nombre de zootechniciens. Cette race détrônée par la charolaise a été re-découverte grâce à la représentation d’une grande fidélité anatomique de Rosa Bonheur dans son Labourage Nivernais.
1848 : peinture de Rosa Bonheur
Problématique : Dans quelle mesure les avancées techniques (outil, instrument, machine, robot, aide la main de l’artiste) ou technologiques (la technologie est la somme des connaissances nécessaires à la conception et à la mise en œuvre d’outils) peuvent-elle remettre en cause le talent artistique ?
Norman Rockwell est connu pour ses peintures qui montrent la vie américaine, mais avant de peindre ces scènes il les mettaient en scène et les faisaient photographier pour s’en servir de modèle.
Norman Rockwell, Triple autoportrait, 1960

Les artistes de l’Hyperréalisme (Chuck Close, Jean Olivier Hucleux), en peinture ou dessin, semblent développer une grande virtuosité technique, car reproduire avec illusionnisme le réel demande un grand savoir-faire mais ils s’inspirent principalement de photographies projetées !
L’anecdote du cheval au galop :
Fin XIXème, une polémique fait bruit : au galop, y a-t-il un moment où le cheval décolle tous ses sabots du sol ?
Impossible à voir à l’oeil nu et les avis se contredisent. Un prix est même promis par le riche amateur de chevaux L. Stanford à celui qui résoudra le problème. Pour trancher la question, le 18 juin 1878, le photographe Eadweard Muybridge dispose 12 appareils photographiques le long d’une piste équestre, de façon à capturer image par image le mouvement du cheval.

La représentation intuitive du peintre Théodore Gericault, dans son tableau Course de chevaux, dit traditionnellement Le Derby de 1821 à Epsom ou simplement Le Derby d’Epsom, huile sur toile, 92 x 122 cm, peinte en 1821, Musée du Louvre, Paris
A partir de la chronophotographie, les techniques d’animation puis de cinéma ne sont pas loin…
Rappel : à l’exposition Voir le Temps en Couleur, au Centre Pompidou Metz, une salle était consacrée à la chronophotographie et aux sculptures d’Edgar Degas, grand peintre et sculpteur et aussi grand amateur de photographie.
Andreas Gursky au travail :
Vidéo en allemand mais très intéressante pour voir la démarche et le processus de travail de l’artiste et de ses assistants : de la prise de vue à la manipulation numérique
* étude documentaire : dessin coloré ou non, qui vise à représenter dans sa plus parfaite vérité intrinsèque un objet sensible et phénoménal, le plus souvent inanimé, en excluant toute volonté d’expression subjective. L’étude documentaire comme exercice d’école est un apprentissage de l’analyse visuelle et de la synthèse graphique. On peut citer, par exemple, les planches anatomiques ou botaniques.
* film documentaire : montage cinématographique d’images visuelles et sonores de données réelles et non fictives. Des aspects de la réalité géographique, sociale, etc., sont filmés et ensuite présentés dans un ordre reconstruit accompagnés d’un commentaire explicatif. L’intentionnalité d’objectivité est évidemment mise en cause par le choix subjectif qu’opère le montage et l’introduction du commentaire. Le film documentaire est le résultat de critères esthétiques et idéologiques.
L’artiste peut augmenter le réel
Augmenter le réel serait lié à un travail d’amplification, d’accentuation, d’exagération pouvant aller jusqu’à la fiction.
- Les ciels rapportés de Gustave Le Gray : https://expositions.bnf.fr/legray/ + exposition au Centre Pompidou Metz « Voir le temps en couleur«
- La série Fauna de Joan Fontcuberta
- Les animaux hybrides de Thomas Grünfeld
Faites un travail de recherche afin de compléter une fiche oeuvre sur Fauna de Joan Fontcuberta et sur Misfit de Thomas Grünfeld appartenant au FRAC Lorraine.
Fiche à télécharger, à ouvrir dans Adobe Acrobat Reader (gratuit), à compléter et à déposer sur Netboard dans « Quelques oeuvres choisies… »
- Les artistes du Surréalisme. Par une construction mentale propre aux rêves, un onirisme créatif, les artistes réinventent une réalité à partir d’éléments captés dans le réel, agencés différemment. (Salvador Dali, René Magritte, Man Ray).
Augmenter le réel parce que personne n’admire une botte d’asperges ou une côtelette de veau dans le réel… mais on admire une peinture qui les représente ! L’art nous oblige à regarder un réel que parfois on préfère ignorer.
Claude Monet, Nature morte : le quartier de viande, Vers 1864, Huile sur toile, 24 x 33,0 cm, Musée d’Orsay, https://www.musee-orsay.fr/fr/oeuvres/nature-morte-le-quartier-de-viande-992
- Les artistes de l’Hyperréalisme. Le réel est amplifié par des techniques artistiques bi ou tridimensionnelles (Jean Olivier Hucleux, Ron Mueck, Patricia Piccinini).
- Les dessins en réalité augmentée de Adrien M & Claire B : La Neige n’a pas de Sens https://www.am-cb.net/projets/la-neige-n-a-pas-de-sens
L’artiste peut détruire le réel
Certains artistes pour créer passent par la destruction :
- Hubert Robert dit le « peintre des ruines« ,
- Les vanités de Sam Taylor-Wood,
- Hommage à New York de Jean Tinguely,
- Les Colères d’Arman,
- Peinture de feu d’Yves Klein,
- La Fille au ballon de Banksy s’autodétruit,
- Break Down de Michael Landy,
- Damien Hirst et sa série d’animaux dans le formaldéhyde,
- The Cremation Project de John Baldessari,
- Le street artiste Blu qui recouvre ses peintures murales dédiées à une exposition
- Les destructions architecturales de Gordon Matta-Clark
- Les moisissures de Daniele Del Nero
- L’exposition Finir en beauté de Sophie Calle pour les rencontres photographiques d’Arles.
Choisissez dans cette liste au moins deux oeuvres relatant la démarche artistique de l’artiste et mettez-les en comparaison autour de l’axe : la prise en compte du réel et la notion de temps. Vous ajouterez des références artistiques personnelles pour étayer vos arguments et points de comparaison. Vous accorderez une attention particulière au vocabulaire en utilisant 5 mots spécifiques aux arts plastiques que vous aurez pris soin de définir.
Texte à déposer sur netboard dans l’onglet « rendus écrits ».
Pour rappel, la méthodologie à suivre est de :
- définir les termes de l’axe de travail (prise en compte, réel, temps)
- choisir au moins deux oeuvres et argumentant votre choix
- décliner l’axe en problématique et sous – questions > différentes parties avec oeuvres comparées
- ajouter dans chaque partie, plusieurs oeuvres personnelles et expliquant le lien avec les oeuvres choisies
- vérifier dans votre écrit que vous utilisez du vocabulaire spécifique et que vous avez pris le temps de le définir
Vidéo résumé et explicative
Ce qu’il faut retenir… (Vérifiez vos connaissances avec Moodle)
